Actualisée
le 2 avril 2008
Depuis
la rédaction de cette chronique, les départs en
file indienne de hauts responsables qui affectent
le cabinet de Rachida Dati auraient pu servir à
la matière d'une analyse sur les limites du
management par la
terreur. J'ai préféré en
commenter le décompte sous la forme d'une note
d'actualisation en fin de texte car ils illustrent par effet miroir les
qualités de "mérite" que les "maîtres
du monde" actuels ont su identifier très tôt chez
madame Dati, comme je le suggérais dans le texte qui suit
cette introduction ajoutée depuis.
Des amis, victimes comme moi et tant d'autres des réseaux
"humanistes" de l'institution judiciaire, me
font part de l'espoir que fait naître la cure
d'orties infligée par le ministre
à ses troupes de magistrats, augurant d'après eux
une cure d'amincissement dont les
habitués des agapes fraternelles feraient enfin
les frais. L'espérance du retour de bâton
à défaut de
remboursement est une sensation que peuvent seuls comprendre ceux qui
ont
tout perdu dans un "jeu" pipé.
Je ne partage pas cet optimisme pour trois raisons:
- "Chez ces gens là, Monsieur, on ne se tue
pas", comme le chantait Jacques Brel,
- un Rastignac n'a que faire des injustices crées par des
prédateurs. Il veut seulement prendre leurs places
pour faire mieux qu'eux.
- les premières réalisations
législatives de la
"feuille de route" montrent que l'arbitraire et l'injuste vont
trouver matière à quitter les pratiques
de l'ombre pour l'impunité de l'officiel
respectable et
vont élargir leurs champs d'actions à
tous les citoyens en s'institutionnalisant.
Un vrai
conte
de fée que
le destin de Rachida Dati, la ministre de la Justice
française, personnalité
inconnue jusque
là dans le paysage politique français, apparue
subitement
en porte-parole sortie du chapeau (1)
du candidat Sarkozy de Nagy
Bocsa. La
presse s'est faite l'écho de ce destin tellement
symbolique, souvent
avec du velours dans la plume ou des gloussements dans la voix
teintés de la retenue qu'inspire l'indéfinissable
sensation de la proximité de tout carnassier.
Car il s'agit bien d'un conte de fée moderne avec tous les ingrédients voulus. Les origines prolétaires et immigrées, le dur labeur entamé plus tôt que la moyenne, la volonté chevillée au corps de l'ambition, les pygmalions et les bons samaritains, les voies de traverse pour doubler la voie royale, les coups de pouce, l'ascension dans les hiérarchies professionnelles et la réussite par l'octroi de l'un des marocains (un signe ?) les plus prestigieux. Sans oublier un certain charme des traits sans lequel Cendrillon a peu de chance d'être du casting.
Cependant, la première vertu d'un conte de fée est de fournir un modèle à ceux que l'espoir berce éveillé. Longtemps basé sur la morale qui fait triompher le pur et l'innocent bafoué pour réunir les deux bouts de l'humanité, le conte de fée évoque maintenant l'ambition et la réussite de sorte que le soulier de vair ne séduit plus par sa beauté mais par sa marque et son prix. Les Eugène de Rastignac ont remplacé les Chevaliers Blancs et les sœurs dominatrices ont ringardisé leur Cendrillon.
Ainsi présentée, la
"carrière"sabre au clair de
cette
Rastignette sert de press-book
médiatique
autant que de carte de visite des "valeurs
républicaines"
selon
la
version et la vision de son
dernier patron-bienfaiteur avec lequel elle
partage les signes de l'indéfinissable
complicité que
connaissent les
enfants d'immigrés quelles que soient leurs
contrées
d'origine et leur point de chute.
Cependant, à ma connaissance, aucun journaliste n'a songé à décrypter le sens de son prénom qui, comme tout prénom arabe a une signification. Il s'agit pourtant de la clé de ce destin si symbolique.
En l'occurrence Rachida se
traduit
par "la
bien
guidée".
L'onction donnée par les fées penchées
sur son berceau a donc laissé sa trace à qui veut
bien la voir. L'essentiel
était
écrit dès le début au royaume des
symboles dont
elle accepte d'ailleurs volontier d'être une sorte
d'ambassadrice. Nous
verrons qu'en
guise d'écriture divine, la plume
a été tenue par des humains de chair et
d'os qui ont su
discerner le profit à tirer du profil.
De fait, son parcours (2) largement et synthétiquement diffusé par les médias, parle pour elle.
Une volonté de Rastignac et de bons Samaritains
De sa Bourgogne natale à la Place Vendôme, ce qui frappe le plus dans le parcours et donc le destin de Rachida, c'est la multiplication des rencontres déterminantes, des coups de mains et des coups de pouce, certes provoqués mais tellement répétitifs que la seule volonté, l'esprit vif et la séduction naturelle n'expliquent pas tout.
De fait, si vouloir suffisait à pouvoir et si les seuls talents étaient la cause de la réussite, la recette produirait à coup sur de nombreuses success-stories, rapidement banalisées par l'évidence de la norme naturelle. Hélas ce n'est pas si simple au royaume des sociétés de l'illusion et du double langage.
Il
faut en effet ajouter à ces
ingrédients, quand ils sont présents, l'ambition
du seul pouvoir, une
parfaite
perception et une adéquation avec les règles
non-écrites du système, le culot
à
forte dose et une aptitude prononcée à la
recherche et à l'utilisation
de la
courte-échelle en guise de promotion sociale.
Avec leurs
corollaires moins présentables que
sont l'absence
de scrupules, un ego
très
egotique, une
aptitude naturelle à privilégier les
"valeurs" des plus puissants moteurs du
moment pour s'en faire une conscience et un talent
certain à
accepter, voire à rechercher
tous les moyens pour y parvenir.
Bref avoir
les traits
profonds de ceux que l'on ambitionne secrètement de
rejoindre dans les hauts
limbes du pouvoir pour un jour leur succéder et
jouir de la pleine puissance qui s'y
attache.
Car ce sont les
conditions pour générer
l'intérêt des bons Samaritains qui par nos temps
modernes ont une notion très
intéressée de
l'altruisme, une perception assez "fraternelle" des qualités
humaines et un sens génétique de la
cooptation.
Vous
pourrez vous évertuer à sonner aux portes ou
à
squatter le paillasson d'un homme de pouvoir, vous n'obtiendrez rien si
votre profil ne lui ressemble pas et qu'il ne pourra
trouver intérêt personnel à vous
coopter en vous fournissant la marche que votre
ego recherche..
C'est certainement à la plupart de ces conditions que Rachida a pu inscrire son nom dans les tablettes d'Albin Chalandon, Jean-Luc Lagardère, Jacques Attali, Henri Lachman, Henri Proglio, Marceau Long, Simone Veil ou Nicolas Sarkozy de Nagy Bocsa (et ceux que la presse n'a pas mentionnés), au point qu'ils lui ont concocté une "feuille de route" personnelle avec balisage du chemin, relais et panneaux indicateurs.
Autant de "contacts" qui permettent de se dispenser des affres de l'envoi circulaire et vain de demandes d'embauche quelles que soient les qualités du CV et de l'intéressé. Qui aplanissent les objections qui parsèment une demande d'admission "sur titres" (un peu gonflés), parfaitement légale mais grandement facilitée par les "avis éblouissants" de "personnalités" comme Simone Veil ou Marceau Long. Qui indiquent la voie à prendre et la porte à frapper tout en adressant parallèlement la chaude et indispensable recommandation au portier. Ou qui suggère la précieuse invitation à suivre un MBA dans une prestigieuse université américaine, tous frais payés par un grand groupe, pour ajouter une dorure utile à son CV.
Le modèle républicain
Présentée
comme un pur produit de la République, Rachida Dati, quelles
que soient ses qualités, est
en fait
un
produit du système.
N'en
déplaise aux néo "consciences
républicaines",
la République
n'a pas vocation à "produire" des individus,
mais
à permettre à travers
l'égalité et la
fraternité à tous les talents de s'exprimer, de
se développer et de servir le bien
de
la
communauté nationale. Le
système quant
à lui, hérité des habitudes
fraternelles des
notables de la III° république,
aujourd'hui largement matiné par l'importation des
conceptions du nouveau monde, sélectionne,
formate, coopte, entraîne et dirige les
seuls
"produits"
qui
le
servent.
Rachida Dati est aussi présentée à travers sa volonté et son mérite comme un modèle qui serait tout à la fois identitaire de la France et de la République. Ne s'est-elle pas auto-qualifiée elle-même à son arrivée Place Vendôme de "symbole de la France". On ne peut bien entendu lui reprocher cette vision quand on se rappelle qu'une certaine république (déjà !) apprenait aux petits des colonies que"leurs ancêtres étaient les gaulois" (3). Les aberrations ont toujours produit des aberrations devenues vérités pour ceux qui les ont le mieux assimilées.
Reste la réduction et l'amalgame qui atteste d'une perception particulière de la France et de la République, qui d'ailleurs sont aussi celles de son bienfaiteur et maître à penser actuel.
Car cette vision est symbolique d'une conception et d'une perception qui ne l'est pas moins. Depuis quelques temps la France et la République sont affublées de "valeurs" à géométrie variable et à usage individualiste (4). Mis à toutes les sauces et utile à tous les "marketings", c'est une sorte de label dont l'utilisation restreinte aux personnels politiques et aux "formateurs" permet d'adapter librement l'histoire et de la traduire au filtre des "valeurs" personnelles pour légitimer ses ambitions. Or les golden boys (ou women) d'aujourd'hui n'ont rien à voir avec les vaillants de Valmy.
Un profil en phase avec le nouvel ordre des choses
Un reportage TV passé en illustration de la nomination de Rachida Dati au Ministère de la Justice, la montrait dans son ancienne fonction de magistrat faisant sèchement la morale sur son aspect physique et vestimentaire à un justiciable la tête baissée et les mains dans le dos, penaud comme un gamin devant la maîtresse. Pas de discours juridique, juste la sèche morale. En dix secondes étaient réunis la conception de la fonction, la manière d'exercer le pouvoir et l'utilisation de la culpabilisation comme instrument de domination (on pouvait aussi y percevoir un mépris certain). Le profil adéquat pour faire passer la pillule de la réforme du statut pénal des jeunes (avant de revenir au bagne pour le vol alimentaire d'une pomme ?), l'automatisation de la peine minimale (avant de transformer les juges civils en magistrature militaire ?), la réforme de la carte judiciaire qui préfigure la fin du ministère de la justice, tout comme d'autres choses beaucoup plus discrètes car humainement inacceptables et très lourdes de conséquences sur notre avenir.
Ces images furtives m'ont rappelé instantanément le très beau texte d'Omar Saïd Al-Kanide, La leçon de piano de Madame Rice au peuple de Cana. Les similitudes de parcours, d'ambitions, de rapports entre la culture d'origine et la norme dominante du pays, de volonté, de "mérite", d'incarnation symbolique d'intégration (au système !), et même de traits physiques sautent aux yeux. Mais l'essentiel est à la racine qu'extirpe superbement Al-Kanide. Le mimétisme s'accompagne de cette gène que suggère l'impression de l'esclave affranchi qui met ses pas dans celui de son maître et qui ne se rend pas compte à quel point il lui ressemble, lui est encore plus utile et ... renforce d'avantage le mépris affectueux que ce dernier lui porte d'être le meilleur contre-maître de ses frères. Car l'analogie ne va pas sans s'élargir aux mentors respectifs de ces deux symboles et ce n'est pas un hasard. Georges Walker Bush et Nicolas Sarkozy de Nagy Bocsa ont chacun leur "housse nigger"(5) . Ainsi s'adapte aux besoins du temps l'occident chrétien de l'axe du Bien.
D'autres images,
nous montrent les
deux visages de la future
ministre
à l'occasion d'un entretien orchestré par Paul
Wermus au cours duquel, pensant être hors caméra,
elle y
reprend en plaisantant le slogan
du kärcher pour nettoyer les
banlieues. Plus que la
"blague" dont on ne discerne pas le ton de la
dérision, c'est l'attitude,
les gestes
et l'intonation de la voix qui sont évocateurs
du "fond de sauce".
Quelques amis m'ont dit y voir d'avantage la
vulgarité que la grossièreté,
notamment dans la
façon de pointer le doigt, la recherche tactile de l'autre
et le rire gras. La remarque est pertinente et je ne les ai
pas contredit.
Il y a aussi les confidences des collaborateurs qui illustrent l'ambiance qui semble régner au ministère depuis que madame Dati y a installé ses ambitions et qui confirment les constats antérieurs fait par d'autres collègues qui ont croisé son parcours. Ou bien l'analyse experte et documentée de Jean-François Probst qui disséque son mauvais-goût, sa brutalité et nous révèle sa tentative manquée de passer par la gauche - alors au pouvoir - pour assouvir l'ambition que la droite lui a ensuite permise .
De même, est très révélateur le penchant non retenu vers la personnalisation de la fonction dont le costume d'apparat, traditionnellement plus proche de la hautaine pourpre cardinalice, est remisé dans les cartons des vêtements has been au profit de la robe de cocktail de grand couturier pour scintiller au milieu du microcosme fréquentant le circuit des mondanités, de préférence médiatisé. Tout comme le "plan de communication" laisse d'avantage l'impression singulière de la jubilation d'une ambition atteinte que l'exercice d'une stratégie contraignante.
Ces petits détails volés en disent plus long sur un individu qu'un long CV ou les "valeurs" symboliques qu'on lui attribue pour fixer sa légitimité. Il ne s'agit pas de juger, mais de relativiser et de cerner les incohérences entre l'image et l'être pour décrypter les intentions réelles et ne pas contribuer au relais des illusions.
En l'occurrence ce décryptage met des mots sur une impression déjà ressentie ailleurs dans les goûts et les comportements de la nouvelle présidence qui semble confondre la haute fonction représentative de la République et du pays avec les us d'un patron de multinationale, voire la présidence d'un Lions ou d'un Rotary Club de riches notables quadragénaires. Deux visages, l'un public et l'autre privé, l'un glamour et l'autre autoritaire que la ministre n'a pu cacher longtemps.
Ainsi se
dessine le nouvel ordre des choses qui s'installe sur et
grâce
à la confusion et à l'illusion de "valeurs"
purement sémantiques. Dès lors, il
n'y a rien d'illogique à ce que les
"symboles" humains du moment, comme l'est Rachida Dati, aient pour
mission consciente ou inconsciente de personnifier l'illusion
de ces "valeurs" à travers la fabrication de leur image tout
en
menant les actions opposées que leur dictent leur
ego et l'ambition de "coller" aux maîtres du
système.
Quoique l'on puisse penser de Rachida Dati, house nigger, Rastignette, mercenaire, prédatrice ou dévorée d'ambitions, on peut affirmer sans risque que son profil a été identifié très tôt par les bons samaritains pour servir une cause dont tout montre qu'elle s'oppose à l'humanité.
Les valeurs de Cyrano
Il me parait utile de conclure en citant le
héros qui traduit ce qu'est
l'esprit français, en tous cas ce qu'il véhicule
de liberté, d'honneur, d'intégrité et
d'audace. Autant de "valeurs"
qui sont des
qualités ayant formé le terreau populaire de la
République. D'autres à travers le
monde s'y
reconnaissent. Ce qui atteste que l'esprit
"français" peu aussi
ne pas être la propriété de la France,
pas plus que le résultat de son exportation.
Je ne suis pas
certain que Rachida Dati y reconnaîtrait "le quart de la moitié
du commencement" d'un sentiment personnel, mais je suis
persuadé que ce passage l'instruirait beaucoup
sur les vertus de la grandeur.
Chercher
un protecteur
puissant, prendre un patron,
Et comme un lierre
obscur qui circonvient un tronc
Et s'en fait un tuteur
en lui
léchant l'écorce,
Grimper par ruse au lieu
de
s'élever par force ?
Non, Merci.
...... Puis s'il advient
d'un peu triompher, par hasard,
Ne pas être
obligé d'en rien rendre à César,
Vis-à-vis de
soi-même en garder le mérite,
Bref,
dédaignant d'être le lierre parasite,
Lors même
qu'on est pas le chêne ou le tilleul,
Ne pas grimper bien
haut, peut-être, mais tout seul !
Cyrano de Bergerac d'Edmond
Rostand
Actualisation:
Depuis la rédaction de cette
chronique, le Directeur de Cabinet du ministre a jeté l'éponge
après seulement 7semaines au service de sa patronne suivi
par
les
démissions de 3
conseillers majeurs puis à la fin août
par celle du chef du cabinet, au
début septembre par 2 autres conseillers
majeurs, en février 2008 par une nouvelle conseillère et
au début avril par un nouveau conseiller d'importance.
Ces abandons ont
illustré le tempérament et le profil du
ministre prisé par ses pygmalions. Un Néron se
cache
toujours
derrière tous les Rastignac !
Mais le plus important réside dans six constats:
1) Les démissionnaires
étaient tous des magistrats
ou des hauts fonctionnaires en charge des aspects les plus sensibles de
la politique
policiaro-judiciaire du nouveau pouvoir et à ce titre ne
devaient pas
être les plus tendres des adeptes de la
société
sécuritaro-carcérale.
- Françoise
Andreo-Cohen,
conseillère
pour le droit des mineurs,
- Philippe
Lagauche,
conseiller pour les questions pénales,
- Xavier
Samuel,
conseiller
pour les libertés publiques et les questions
constitutionnelles,
- Jacques Carrère, conseiller
technique pour l’organisation judiciaire et la magistrature,
- Valérie Bonnard, conseillère
technique pour le dialogue social et les affaires
budgétaires (cette dernière
officiellement virée).
Auxquels s'ajoutent Gaël Tchakaloff,
conseillère
chargée de la stratégie, et
en particulier de la mise en place de la carte judiciaire et Pierre
Boussaroque, conseiller
diplomatique,
dont le départ
est probablement lié la
conception très personnelle du ministre en ce qui concerne
l'application des obligations issues de l'accord franco-tchadien
d'entraide judiciaire aux termes duquel la France est garante de
l'éxécution de la condamnation civile
frappant les
pieds nickelés de l'Arche de Zoé.
Difficile de ne pas en
déduire que c'est la
découverte de la réalité profonde
des orientations et des objectifs du patron du
ministre, en plus de la méthode,
qui sont apparus inacceptables et dangereux pour ces
spécialistes pourtant certainement peu enclins à
la mansuétude judiciaire et à la bonté
humaniste. Il est
révélateur que cet aspect des choses n'ait pas
fait l'objet d'une fouille un peu poussée par la presse.
2) Ceci n'a pas empêché que la première "réforme"
(la
sanction automatisée de la récidive et la fin de
l'excuse de minorité
pénale) confiée à Rachida Dati soit
passée en express. Preuve qu'elle a une importance et une
urgence manifeste dans un "dispositif" de pénalisation de la
société suivant le modèle bushien dont
le président français
possède la licence d'importation.
3) La
ministre en service commandé
a été particulièrement
"drivée"
pour son passage devant les instances législatives. Ce qui
trahie la potentialité du risque de la voir se
décomposer face aux questions précises
sur les fondements républicains et les
conséquences évidentes sur la forme de
société qu'induisent les nouvelles
règles qu'elle a été
chargée de faire ratifier en VRP
ambitieux.
4) Le
rôle
d'acteurs comparses des
"représentants" du Peuple (à deux ou
trois
exceptions près) montre
définitivement qu'ils n'ont aucune
notion de ce
qu'est une société républicaine,
qu'ils servent
le système qui les a choisi et ne
représentent que les intérêts ou les
intentions de leurs
bailleurs respectifs..
5) Groupies ou opposants à Rachida Dati surfent sur l'image
commode de l'atypique ministre ce qui permet de
s'affranchir du fond. Ainsi, le "courage" de ses opposants - autrement
dit
les concurrents dans la carrière et dans le
système - s'est borné
comme à l'habitude à une attaque dans les
coins,
genre peau de banane médiatico-moralisatrice, en rappelant
la
tendance délinquante et les déboires judiciaires
d'une partie de sa famille, au lieu
de mettre en évidence
le premier constat et ce qu'il révèle.
6) Avec les deux derniers départs, ce n'est pas
l'avenir des citoyens et le visage judiciaire de la
république qui ont
provoqué les états d'âmes des
démissionnaires, mais l'avenir
de l'institution elle-même et probablement la
découverte du "profil" souhaité des futurs
magistrats. En effet, le départ du
conseiller en
charge de l'organisation judiciaire et de la magistrature est un
symbole révélateur que confirment les
doutes sur les capacités de l'ex
magistrate au 2 ans de carrière
(compensés par des
exigences de jeune loup) et la défiance du
milieu qui
subit à son tour les
affres du dirigisme flirtant
avec
le viol de la loi et les principes
républicains,
jusque là réservé aux
justiciables. Quant au départ, forcé
celui-là, de la conseillère en
charge du
dialogue social et des affaires budgétaires, il suffit
à se faire
une idée du traitement futur
réservé aux deux domaines de
compétence qui étaient les siens.
Décidément, ceux qui ont
confié sa feuille de route à Rachida
Dati savaient qu'elle serait en de bonnes mains pour
être
menée à bien et à son terme.
NB: Merci de signaler les liens inactifs. Une copie PDF ou vidéo de ceux-ci vous sera adressée.
(1)
Sur le forum du journal Le Nouvel Observateur; l'Avocat
Général de la Cour d'Appel de Paris,
Philippe Bilger, non suspectable d'être un "magistrat
rouge", a parfaitement résumé,
avec un grand bon sens, la promotion de Rachida Dati: "Selon lui, la ministre
de la justice "n'a pas été choisie par le
président pour sa compétence" mais parce qu'elle
"est une femme, un
symbole et le chouchou du couple présidentiel" .
(2)
Version Pdf de l'article si le
lien est mort. Autres sources: Rachida Dati: Une ascension irresistible,
Rachida Dati: La
révélation UMP de cette campagne, Rachida Dati sur le terrain judiciaire,
Rachida Dati, Sarkozette sans complexes, CV sur le site du gouvernement, La face cachée de Rachida Dati
(3)
La formule "Nos
ancêtres les Gaulois" appliquée aux enfants des
colonies qui est couramment employée pour stigmatiser le
rapport colonisateur/colonisés est évidement
synthétique, réductrice et forcément
grossière. Elle fut prononcée (et
pensée ?) par un grand nombre d'instituteurs de la
III° république qui ne faisaient que reprendre la
mention qui figurait dans les manuels d'histoire de cette
époque et qui a disparue dans ceux
de la IV° république.
Elle a pour but d'illustrer à gros traits l'état
d'esprit qui animait une bonne partie de la pensée morale et
philosophique de l'élite de l'époque pour
justifier aux yeux de leur socle social et de la population
française l'occupation des pays colonisés et
l'apport "bénéfique" de l'exploitation de leurs
richesses (voir les discours de Jules Ferry en particulier). La
République allait civiliser, apporter les
Lumières et éduquer les populations primitives
comme les conquistadors allaient évangéliser les
descendants des Incas. Les mêmes motifs pour des objectifs
identiques, les francs-maçons suivaient les traces et la
philosophie des évangélistes romains.
C'est bien sur cette vision du rapport avec l'étranger
version "bon sauvage" que j'ai voulu illustrer en reprenant la formule
afin de suggérer la prédominance du formatage au
"système" sur l'origine ou la couleur de peau.
Cela étant, "nos ancêtres les Gaulois" n'est pas
une "invention" de la colonisation à destination des peuples
africains, asiatiques ou polynésiens. Elle est en fait une
écriture assez récente de l'histoire officielle
qui a fleuri en métropole avant même que les
colonies n'existent.
En effet, c'est à la Révolution que les
représentants du Tiers État ont
invoqué la filiation gauloise pour asseoir la
légitimité de leur pouvoir en opposition avec
l'aristocratie et la monarchie qui se réclamaient de la
conquête franque (voir
Vercingétorix et
l'idéologie française
d'André SIMON -
Éditions Imago - 1989).
Dans l'esprit des
révolutionnaires de 1789, les nobles étaient des
étrangers qui avaient usurpé le pouvoir et par
voie de conséquence, le rapport de force s'inversant entre
"vaincus" et "occupants" d'hier, cela justifiait que les descendants
des Germains soient renvoyés dans leurs contrées
d'origine. L'expression "nos ancêtres les Gaulois"
était donc d'avantage un violent défi symbolique
que la revendication d'une identité propre.
Sous Napoléon, l'expression a perdu de sa consistance
polémique, même si les historiens y faisaient
encore référence. Les origines franques ou
gauloises se sont même fondues pour illustrer la
réconciliation entre l'ancienne et la nouvelle France qui
correspondait aux voeux de grandeur de l'Empereur. En prenant les
"valeurs" de ces deux origines, il brassait large pour favoriser
l'adhésion à ses conquêtes.
La restauration qui suivi balaya cette fusion pour revenir à
l'opposition parfois très violente entre les deux origines
franques et gauloises. C'est à partir de 1830 avec la
Révolution de Juillet que les ancêtres gaulois se
sont définitivement imposés. L'expression allait
alors fleurir dans tous les ouvrages scolaires avec cependant une
teinte prononcée pour la fusion dans un esprit d'apaisement
("Nos ancêtres
les Gaulois". Genèse et avatars
d'un cliché historique - Henri Duranton - Cahiers d'histoire
1969).
Comme vous le voyez, tous les slogans correspondent à des
stéréotypes chargés d'une symbolique
destinée à éveiller ou
réveiller dans les populations les sentiments utiles
à l'accomplissement de l'objectif peu avoué ou
carrément pas avouable.
Ainsi, les ancêtres Gaulois enseignés aux "petits
des colonies" (et par voie de conséquence à leurs
parents) signifiait moins une origine ethnique ou ancestrale que les
fondements de la "civilisation" que leur apportaient les "bienfaiteurs"
français. L'objectif de la signification était
d'ailleurs la même pour les "petits français" que
les "hussards de la République" s'employaient à
"éveiller". En "aspirant" les plus réceptifs de
ces enfants aux principes du "système", les tenants de ce
dernier garantissent sa pérénnité (et
la leur !). Dès lors, si une formule comme "nos
ancêtres les gaulois" fait sourire ou scandalise la
majorité des français et les originaires des
colonies, elle contient, derrière une symbolique
grossière, une autre symbolique qui est le support d'un
système.
(4)
Il en est ainsi de la conception très
personnalisée du principe de la présomption
d'innocence
qui s'applique, parfois en dehors de toute morale quand il s'agit de
nommer à un poste ministériel un élu
inculpé sur des bases sérieuses et qui passe aux
oubliettes quand il s'agit de réagir dans la minute sur la
culpabilité (quasi invariablement infirmée en
partie
lorsque les faits sont établis) d'un citoyen lambda, fut-il
un chauffard.
(5)
House Nigger: littéralement "nègre de maison"
- Expression utilisée par les maîtres de
plantation dans le sud pour qualifier les esclaves soumis qui
pouvaient être employés au service domestique, en
opposition avec les "fields nigger" (nègre des champs)
qui etaient considérés comme rebelles.