Il y a
plusieurs façons de
comprendre la démocratie selon que l'on se trouve dans la
catégorie des électeurs ou dans celle des
élus.
Pour les premiers, forcément les plus nombreux, elle se
résume à une
volonté
exprimée dans un
mandat limité, confié à
un
représentant désigné personnellement
et de plein gré. C'est l'esprit du principe de
représentation et de délégation.
Pour les seconds, elle est un moyen
d'accéder au pouvoir par
le biais de la légitimité populaire.
Ces deux visions font relativement bon ménage tant que les électeurs choisissent librement leurs candidats, puis leurs élus, et que ces derniers ne prennent pas trop de libertés avec les limites de leur mandat, ce qui n'est plus du tout le cas aujourd'hui.
Dans notre république ou, comme le rappelait Robert de Flers, la "Démocratie est le nom que nous donnons au peuple chaque fois que nous avons besoin de lui", la symbolique tient lieu de philosophie, de morale et d'illusion. Par voie de conséquence la manipulation est une méthode de gestion de la démocratie représentative.
De
fait, la
majorité des électeurs se
sent flouée deux
fois.
D'abord par la
liberté très relative du choix
des candidats et ensuite par l'utilisation
sans
retenue
qu'une grande quantité d'élus font de plus en
plus du mandat
confié, confondant
délégation limitée et blanc-seing,
charge d'élu et fonction de PDG, gestion des moyens et
utilisation discrétionnaire
de
la
puissance publique.
Que ce soit au niveau local, régional ou national, la liste des actions et des décisions majeures qui sont prises durant un mandat sans avoir été annoncées avant l'élection ou approuvées par la population et dont l'objet ou le coût dépassent la gestion courante, est pharaonique
Qui savait avant qu'il ne soit investi que tel élu allait
décider de
construire les dispendieux et inutiles rond-points ?
Qui a
donné son accord au choix architectural de telle ou telle
médiathèque dont le coût est quatre
fois supérieur à un bâtiment standard
et fonctionnel ?
Quel citoyen a donné quitus aux lois sur la
biométrie, sur le fichage, le puçage ou le
contrôle global dont il est l'objet ou la "cible" principale
?
Qui va autoriser tel
député ou sénateur à voter
l'illégalité du refus
d'accepter une antenne de téléphonie dans son
jardin pour raison de santé publique ?
Cette liste revient
quasiment à compiler la majeure partie des textes de loi
votés, à dresser l'inventaire des constructions
qui ne figuraient pas dans les programmas électoraux,
à inventorier les décisions engageant
l'avenir ou le portefeuille des citoyens non
prévenus au préalable de ces choix ou
à quantifier les confusions entre bien public et
privilèges.
Bref, la réalité n'a pas grand chose à voir avec le principe démocratique et républicain confirmant qu' "en démocratie, la politique est l'art de faire croire au peuple qu'il gouverne" comme le disait Louis Latzarus.
La sélection des candidats à l'élection présidentielle vue par les "consciences de la république"
La première entorse avec l'esprit du principe d'une élection démocratique est de sélectionner à priori ceux qui auront le droit d'être candidats. En fait, il s'agit plus d'une négation que d'une entorse. Dans le cas précis, il s'agit même d'une manipulation.
La nécessité de ne
pas confondre campagne électorale et opportunité
de
médiatisation, ce qui est tout à fait normal, a
servi de prétexte au principe
établi en
1962 appliqué à l'élection
présidentielle. Les
inspirateurs de cette sélection ont
décrété qu'il y avait des candidats
"sérieux" et d'autres "fantaisistes". Curieuse vision pour
des "consciences républicaines"
puisque l'appréciation
du
"sérieux" est une
notion
extrêmement vague, subjective et bien pratique
si on considère ses
propres
croyances comme étalon. Bref, une vision
très personnelle imposée aux autres.
Ainsi, le "fantaisiste" Coluche était-il "sérieux" en proposant d'ouvrir les stocks de nourriture inutilisée à ceux qui en sont privés ? Est-ce un hasard si la réponse populaire n'était pas celle du "milieu" ? Cela en dit long sur la notion de sérieux, de compétence et de légitimité populaire des "élites républicaines".
De fait, pour évaluer le "sérieux" du futur élu tout en laissant aux électeurs l'impression que chacun d'eux peut solliciter les suffrages ou donner le sien à la personne de son choix, les "consciences" de la république ont choisi un moyen imparable: la cooptation.
Or, il n'est pas inutile de rappeler que celle-ci est une condition vitale pratiquée de longue date par tous les "cercles" pour garantir la pérennité de leur pouvoir puisque le "profil" du coopté ne peut évidement être différent de celui du coopteur qui le choisi.
En effet, en ne rendant accessible l'élection présidentielle qu'aux seuls candidats ayant satisfait à la cooptation du milieu politique, les spécialistes du microcosme que sont les élus de métier, les journalistes dédiés et les politologues estampillés, ont institué et préservé une gestion du système en n'acceptant que des individus qui ne peuvent le remettre en cause. Accessoirement, ce "pipage" des dés a l'avantage de faire supporter aux électeurs la responsabilité de la pensée unique dont ils subissent les dramatiques conséquences. De même il permet de faire croire que ce sont les "meilleurs" qui font face aux situations alors qu'elles sont largement engendrées ou permises par eux.
Par voie de conséquence l'élimination de ceux qui, peu ou prou, ont une vision et une méthode différente, entraîne un paysage et une "offre" politique aux couleurs artificiellement variées, .... mais une "gestion" sur un même dessin. Est-ce encore un hasard ?
"La guerre est une affaire trop sérieuse pour la laisser aux militaires" disait Clemenceau. De la même manière la politique est une chose trop sérieuse pour la laisser aux "spécialistes" quand on se revendique de la démocratie. En abandonnant cette évidence, on a laissé s'instaurer pour l'élection présidentielle un système d'auto sélection fermée des candidats par des "spécialistes" qui ont clos volontairement le principe démocratique et ont choisi d'imposer des dirigeants formatés à la même matrice. Ce parrainage non-citoyen est clairement une volonté de limiter la portée du vote à la forme pour garantir la certitude d'un fond similaire.
Cette démocratie élective confisquée ne permet plus d'exprimer sa volonté mais de faire un choix par défaut sur la base d'une sélection imposée. Dès lors l'action de voter n'est plus qu'un symbole qui sert au mieux de légitimité à ceux qui ont le droit d'être élus et qui est opposé aux électeurs pour les renvoyer dans les cordes à chaque fois qu'ils dénoncent des abus de mandats ou des tromperies.
La sélection des candidats à l'élection présidentielle telle qu'elle devrait être
L'évidence et le bon sens obligent donc à considérer que si une élection est véritablement démocratique et populaire, elle doit obligatoirement être totalement libre, non seulement par l'accès de tous au vote, mais surtout par le choix initial et spontané pour chaque électeur de son candidat.
Si le principe du parrainage est nécessaire pour éviter que l'élection ne soit confondue par certains avec un moyen de chauffer leur ego au soleil des projecteurs médiatiques, il ne peut être que populaire, c'est à dire émanant directement du peuple.
Dès lors, il suffirait pour concourir dans toute élection qu'un candidat ait reçu tout simplement un certain nombre de parrainages d'électeurs, le nombre variant en fonction de la population appelée à se prononcer. Pour ce qui est de l'élection présidentielle le simple remplacement des parrainages des élus par ceux des citoyens et le relèvement du nombre nécessaire minimum de ces derniers rétablirait la démocratie qui de fait n'existe pas actuellement.
Et si le nombre des "petits candidats" est important, il aurait au moins le mérite d'offrir une meilleure garantie de "sérieux" car un "petit candidat" sera toujours plus attaché à la mise en oeuvre de son programme qu'un vieux routier dont ce n'est que la devanture. Sans parler du bon sens et des volontés sincères de faire ce qui a été annoncé.
On peut d'ailleurs imaginer qu'un citoyen soit porté candidat sans en avoir eu l'intention, par le seul jeu du plébiscite populaire qui reconnaît les qualités et les talents dans les actes et les réalisations plus que dans les titres et les paroles.
A l'heure ou une majorité de citoyens
n'hésitent plus à dire qu'une majorité
d'élus sont corrompus, le temps semble venu de passer
aux
actes
et de reprendre
à la base le pouvoir de décision
personnel jusque là habilement
enfermé dans des choix de forme par les gardiens du Temple
et les "consciences officielles" dont la
légitimité populaire est loin
d'être prouvée.
NB:
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vous sera adressée.
A lire:
L'illusion
démocratique 2 - Choisir les électeurs
L'illusion
démocratique 3 - Du vote symbolique au vote effectif